denis dubois
Né en 1969 à Granville (Manche) où il vit et travaille
•2015. Collaboration avec les ateliers Christian Dior pour la création du modèle de foulard Le jardin en folie
•2013. Festival Atlantide. Parc des expositions, Nantes (Loire-Atlantique)
•2009/2011. Artothèque “Le Radar”, Bayeux (Calvados)
et “Usine Utopik” -relais culturel- Tessy-sur-Vire (Manche)
«Nous Deux -affinités plasticiennes-». Galerie mlc, Vains St-Léonard (Manche)
•2010. Résidence “Centenaire Gaston Chaissac”. Sainte-Florence (Vendée).
•2014/15/16/17/18. Collabore en qualité d’illustrateur auprès de divers titres de presse dont «L’Obs», «Stratégies», «Le Monde», «Cosmétique-mag»…
❏ Regarder le travail de Denis Dubois signifie plonger dans une trame d’images issues d’un univers multifacettes, découpées en des zones temporelles incongrues… Ce travail, malgré le chaos qu’il engendre dans notre imaginaire, suit manifestement la tradition des artistes Surréalistes et Dadaistes. On peut noter l’influence des collages de R. Haussmann et de Max Ernst ainsi que de la peinture de Chirico et de René Magritte, mais aussi de ses contemporains de la “Nouvelle Figuration”, affichant une posture amère face à la société de surconsommation, comme autant dans les oeuvres de Neo Rauch ou Martin Kippenberger, où la critique du monde du travail, de la consommation et de la religion, se mélange à un monde fantastique, rempli d’histoires, et souvent empreint d’humour noir.
❏ Juliano Caldeira
montage photo. impression numérique. tirage limité à 20 exemplaires
❏ Denis Dubois est, comme il le dit lui-même, « Manufacteur d’images ».
Ses vignettes détournent l’imagerie populaire et les dessins d’almanach de la Belle Époque aux années 1950. A première vue, on y reconnaît la manière des gravures ornant les romans de Jules Verne, celle des affiches d’exposition universelle ou des unes de la presse à un sou. L’imagination vogue quelques part entre le Tour du monde en 80 jours et le Petit journal (celui du XIXe siècle).
La bible profane de l’artiste est le vieux catalogue Manufrance, cette entreprise stéphanoise de vente par correspondance de bicyclettes, d’objets de chasse, de passoires à poignées et d’horloges murales. La vente à distance oblige à une description détaillée et imagée des produits et de leur utilisation.
Mais ce didactisme renvoie chez Denis Dubois un subtil fumet d’ammoniac, cette essence d’humour noir. Le poupon sorti du bain dans une scène de pédagogie hygiéniste devient un réjouissant gigot, que l’on sèche et dorlote.
Plus loin, les braves paysans constituent une sainte famille rurale choyant une grosse patate. Et le berger landais embroche ses moutons dans ses échasses, façon brochette de troupeau de méchoui.
❏ Aitor Alfonso. Webzine «Boum-Bang». Avril 2012
montage photo. impression numérique. tirage limité à 20 exemplaires
géniteur satirique
❏ À première vue, en zieutant d’un oeil paresseux et distrait sur le travail de Denis Dubois, l’inattentif profane pourrait croire être confronté aux productions ancestrales et démodées d’un estampeur du milieu du XIXe siècle, séries de reliques visuelles d’un autre temps qui auraient traversé les siècles pour se retrouver égarées dans les limbes d’un cabinet de curiosités poussiéreux.
Les supports sur lesquels reposent les travaux de l’artiste, en effet, évoquent les lithographies jaunies et fragiles de Charles Philipon ou d’Honoré Daumier, influents caricaturistes en série du « long dix-neuvième siècle », géniteurs géniaux de l’art satirique moderne comme on le conçoit aujourd’hui.
Détaché du regard brumeux des premières impressions, l’oeuvre de l’artiste, originaire de la Manche et de la commune portuaire de Granville, se rapproche en réalité davantage de l’avant-gardisme artistique du siècle dernier, et n’est pas s’en rappeler les collages dadaïstes et surréalistes d’un Max Ernst ou, plus encore ceux de Jacques Prévert, décousus et viscéralement provocateurs.
Photographe et graphiste, le méconnu Denis Dubois s’autoproclame d’abord officiellement « manufacteur d’images » en se faisant le réalisateur boulimique d’une oeuvre pléthorique et bizarroïde, lui qui déconstruit et refonde un univers novice et qui entremêle et assemble les éléments d’une réalité obsolète dans un ordre nouveau. Ici, pas de place pour la vraisemblance officielle, là où les visions et les impressions sont aseptisées et codifiées, réflexes sociétaux et culturels inconsciemment encrés dans les esprits. Ce qui compte désormais, c’est la perception que l’artiste se fait de cette vraisemblance et le nouvel univers qui s’élève sous nos yeux, délétère, vicieux et désossé de toute normalité.
Les images, ainsi collées et juxtaposées, sont décontextualisées et déplacées de leur base originelle et associées à d’autres icônes pareillement émigrées, qui, accouplées, accouchent de calembours visuels singuliers teintés d’un humour acide et décapant. En cela, Denis Dubois et ses drôleries imagées se placent dans la filiation d’un Magritte ou d’un Mariën, sans toutefois en oublier de se connecter au temps présent et de poser un oeil sévère et critique sur la société de consommation exacerbée du XXIe siècle.
Alternativement, Denis Dubois introduit une réflexion sur le rapport entre l’homme et les choses, entre l’homme et l’animal, entre l’homme et lui-même. Dans une vignette, la figure éreintée d’Atlas dérange la narration mythologique traditionnelle et porte au-dessus de sa tête une patate géante. Dans une autre, un toréador dompte sans zèle un chiot inoffensif dans une arène entièrement vide, alors qu’ailleurs, un chasseur de baleine est écrasé sous le poids titanesque de sa proie marine, le harpon encore serré entre sa main meurtrie. Ici, un homme porte le visage d’un cadenas encombrant, symbole de l’uniformisation castratrice contemporaine. Là, un autre essaye stérilement de soulever l’immense poids d’un rat démesurément grand dans une fascinante inversion des proportions.
Quelque soit le thème abordé et l’image utilisée pour l’illustrer, le leitmotiv du second-degré et du pessimisme existentiel demeure, chez Denis Dubois, résolument omniprésent.
Par le biais d’une oeuvre globale multithématique, brillamment pensée et soigneusement exécutée, l’artiste nous offre définitivement un voyage surréaliste et alternatif dont on ne sort pas indemne. Encore faut-il toutefois, pour ressentir les séquelles de cette expérience, être capable de s’extirper de cet univers encore plus véritable que la vraisemblance.
❏ Bastien Stisi. Webzine «Boum-Bang». Novembre 2012
Collaboration avec les ateliers Christian Dior pour la création du modèle de foulard Le jardin en folie (2015)
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